Back to Bazics - Épisode 2 : Worth, le père fondateur de la Haute Couture

Quand il s’agit de l’univers de la mode, le nom Charles Frederick Worth ne t’est sûrement pas inconnu. Il y a même eu une rétrospective de son œuvre au Petit Palais intitulée “Worth, inventer la haute couture.”, (J’espère que tu es allé la voir ! )
Je voulais impérativement te parler de celui qui a littéralement inventé la haute couture. Voici donc l’histoire du père fondateur d’une industrie toute entière.

C.F. WORTH — Les débuts

Le 13 octobre 1825 naît à Bourne, en Angleterre, un jeune homme promis à révolutionner la mode : Charles Frederick Worth. Issu d’une famille modeste, il fait ses premières armes chez deux marchands de textiles londoniens en tant qu’apprenti.
Cette expérience lui permet d’acquérir de solides connaissances sur les étoffes et l’art du vêtement.

Durant ses rares temps libres, Worth visite la National Gallery, où il contemple les portraits royaux. Devant ces toiles, il s’imagine sublimant les reines et grandes dames de son époque, admirant les drapés, les ornements et l’élégance intemporelle de leurs robes. C’est au détour de ces galeries, que sa vocation se peaufine.

En 1845, à 20 ans, Worth quitte son Angleterre natale et pose ses valises à Paris. Grâce à ses connaissances textiles, il obtient un poste chez Gagelin, qui à l’époque était la principale maison de textile en France. Il commence comme vendeur, mais il est tellement sérieux et investi qu’on lui donne rapidement la direction de la section couture.
C’est acté, il devient couturier à Paris.

Ses créations attirent vite l’œil des clients les plus raffinés. En 1851, elles sont présentées à l’Exposition universelle de Londres, puis à celle de Paris en 1855, où elles reçoivent plusieurs distinctions. Ces récompenses participent à la renommée de Gagelin mais consacrent surtout Worth comme le créateur en vogue !

Petite anecdote, comme j’adore en citer : la garde-robe de sa femme, Marie-Augustine, entièrement dessinée par lui, suscite toutes les convoitises.

Ce succès croissant lui permet d’ouvrir, en 1858, associé à Otto Bobergh, sa propre maison au 7 rue de la Paix : La première véritable maison de haute couture.

La Maison Worth : l’audace d’un visionnaire

Charles Frederick Worth n’est pas un simple couturier. Il est un visionnaire, un précurseur.
Là où ses confrères se contentaient d’exécuter les désirs de leurs clientes, lui imagine, innove et crée.

Dans son atelier, on invente des modèles uniques, inspirés par sa propre vision. Il choisit les tissus, les couleurs, les coupes en bref il impose son regard.
Ce qu’il fait d’encore plus innovant : lance ses propres collections!

C’est ainsi que naît un nouveau rythme : le cycle de la mode (printemps-été, automne-hiver). Et la première mannequin attitrée, c’est sa femme, qui défile dans les rues de Paris, offrant à Worth une belle publicité.

Enfaite, à lui seul, inventé :

  • la haute couture,

  • les collections saisonnières,

  • le mannequin comme vecteur d’image.

Son talent séduit la haute société : princesse de Metternich, Eugénie de Montijo, et bien d’autres femmes d’influence.
Sous le Second Empire, Paris redevient capitale impériale, vitrine du luxe européen, ça devient un terrain de jeu idéal pour Worth.

Visionnaire, il comprend aussi le pouvoir de la photographie, qu’il utilise pour diffuser ses créations à travers le monde.
Dans les années 1860, à l’apogée de sa gloire, il devient le premier couturier à exporter ses pièces à Londres et New York. Même l’impératrice Élisabeth d’Autriche (Sissi) succombe : il lui crée la célèbre robe aux étoiles, portée lors d’un bal en 1864.

“Elle arborait une robe blanche brodée d’étoiles et portait dans ses cheveux ses célèbres étoiles de diamants… Je n’ai jamais vu un tel effet.” — Archiduc Louis-Victor

Worth devient ainsi le couturier le plus en vogue de la cour.

Bien plus qu’un artiste… c’est aussi un homme d’affaires

Au-delà du créateur, Worth est aussi un homme d’affaires .
Il organise des présentations de collection avec de véritables mannequins vivants (qu’on appelait alors des sosies), et accepte même que ses modèles soient copiés dans les grands magasins; dans sa logique cela permettre d’anticiper diffusion la sortie de ses prochaines créations.

Il fait aussi évoluer la silhouette féminine, remplaçant la crinoline par la tournure, et introduit des collections thématiques.
En collaborant avec des artistes et artisans, il crée un dialogue inédit entre créateur, artisan et confectionneur.

La fin d’un créateur, le début d’une industrie

Charles Frederick Worth s’éteint le 10 mars 1895, laissant sa maison à ses deux fils.
Ses créations, elles, traversent le temps. Il fut avant-gardiste, audacieux et inventif : à lui seul, il a influencé toute une industrie et posé les codes que suivent encore aujourd’hui les plus grands couturiers.

Mais après Worth, un autre homme allait bouleverser la couture. Son nom ? Paul Poiret


(À suivre...)

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